Vous venez d’apprendre le décès d’un proche il y a peu de temps duquel vous croyiez devoir hériter. Il vous a d’ailleurs souvent fait mention que vous hériteriez de certains biens ou de sommes d’argent au moment de son décès. Il est déjà particulièrement difficile de faire face à une telle épreuve. Toutefois, quelques temps après le décès de cet être cher, vous apprenez par d’autres membres de la famille que vous n’êtes, à votre grande surprise, aucunement mentionné dans le plus récent testament du de cujus[1] ou encore vous l’apprenez par l’entremise d’une recherche testamentaire auprès de la Chambre des notaires du Québec ou du Barreau du Québec.
C’est surprenant, voire choquant, puisque vous étiez en possession d’un testament antérieur qui faisait mention de vos droits à titre de successible.
Vous commencez donc à vous poser de sérieuses questions afin d’expliquer ce revirement de situation que vous n’aviez pas du tout anticipé. Vous cherchez des explications au tout et c’est tout à fait normal. Il est difficile d’avoir des réponses exactes à toutes ces interrogations. Cependant, vous vous questionnez quant à vos droits afin de faire annuler le plus récent testament du défunt ?
Voici les principales raisons justifiant l’annulation d’un testament afin de rendre valide un testament antérieur.
La captation
Essentiellement, la captation, laquelle est également connue sous l’expression influence indue, est définie comme suit :
« Utilisation de manœuvres répréhensibles, voire dolosives, pour amener une personne à consentir une libéralité1 qu’elle n’aurait autrement pas consentie. « Les mots “suggestion et captation” illustrent assez bien de quoi il s’agit : quelqu’un s’empare de la volonté du testateur et lui suggère comment il doit tester. Mais ce qui doit être considéré comme suggestion et captation pourra varier d’un cas à l’autre, selon les circonstances particulières propres à l’affaire soumise. L’âge, l’état de santé, la condition sociale, du testateur pourront avoir joué un rôle quant au degré de résistance qu’il pouvait opposer aux manœuvres dont il était l’objet »[2]
Afin d’attaquer la validité d’un testament dans le but ultime d’en obtenir l’annulation, une Demande introductive d’instance en annulation d’un testament devra être introduite devant la Cour supérieure.
Le fardeau devant être rempli est, dans un tel contexte, de démontrer l’existence d’une influence particulière réalisée à l’endroit du défunt afin d’inciter celui-ci à instaurer des legs spécifiques dans son testament au bénéfice d’une personne en particulier. Comme tout recours en matière civile, le fardeau de la preuve doit être rempli selon la « balance des probabilités ». Autrement dit, le demandeur doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que cette situation se soit véritablement produite.
Maintenant, l’un des principaux défis auxquels il faut faire face lorsqu’un tel recours est entamé est que la preuve est généralement faite par présomption. En effet, « la captation se fait souvent derrière des portes closes »[3], Ces présomptions seront établies généralement lorsque nous arrivons à démontrer un phénomène d’isolation soudaine du défunt contemporaine à la réalisation du nouveau testament par exemple. Il est également possible, dans cette situation, d’envisager avoir recours à la consultation du dossier médical du défunt, lequel pourrait être également révélateur à certains égards. Vient maintenant le second principal motif pour contester la validité d’un testament.
L’incapacité du défunt
Ce second motif est l’incapacité du défunt à réaliser un testament au moment où celui-ci a été complété. Bien qu’en fonction de la forme du testament choisie par le défunt (notarié, devant témoins ou olographe) certaines mesures sont en place pour limiter les possibilités d’incapacité du défunt à signer un testament, ces situations peuvent tout de même survenir malgré tout.
En de telles circonstances, des indices pertinents peuvent être révélateurs pour l’héritier souhaitant attaquer la validité dudit testament comme la vulnérabilité et l’incompréhension du défunt de son vivant ou encore l’existence d’une maladie cognitive l’affligeant. Encore une fois, le dossier médical du défunt au sein d’établissement de soins de santé sera pertinent à consulter de manière contemporaine à la signature du testament attaqué par un recours en annulation de testament.
Toutefois, rappelons que la capacité de tester est présumée. Tous sont donc présumés être en mesure de signer un testament représentant leurs dernières volontés. Afin de convaincre le tribunal de cette incapacité du défunt, le successible souhaitant attaquer ledit testament devra faire la preuve, bien souvent par le biais d’un expert, de l’inaptitude du défunt à comprendre la nature de l’acte juridique complété et des conséquences en découlant.
Ce second motif de contestation d’un testament peut également être jumelé au premier motif relié à la captation. L’un n’empêche pas l’autre.
Contestation de la forme (au stade de la vérification)
Pour conclure, il est important de préciser que lorsque le testament retrouvé du défunt est soit 1) un testament ayant été fait devant témoins ou 2) un testament olographe, il sera nécessaire de faire vérifier ce testament par le tribunal. Cette procédure vise à obtenir l’aval de la Cour supérieure quant à savoir si le testament retrouvé remplit toutes les conditions de forme requises pour être considéré valide selon les exigences établies au Code civil du Québec.
Il est possible pour un successible de contester la vérification du testament et, encore une fois, nous pouvons vous accompagner avec ces démarches de contestation.
Dans la mesure où vous croyez faire face à l’une ou l’autre de ces situations, n’hésitez pas à communiquer avec nous et nous verrons à vous accompagner afin de faire valoir vos droits.
Samuel Grisé, avocat
[1] « Expression latine qui désigne la personne décédée dont la succession est ouverte. » via le Dictionnaire de droit québécois et canadien accessible en ligne par l’entremise du Centre d’accès à l’information juridique.
[2] Perrault, dans Études juridiques en hommage à Monsieur le juge Bernard Bissonnette, 443, p. 459 via le Dictionnaire de droit privé et lexiques bilingues accessible en ligne par l’entremise du Centre d’accès à l’information juridique.
[3] Guay c. Guay, 2024 QCCS 4602.